Histoire d’une liaison…Sankaku-Jime, dans le magazine l’Esprit du Judo
6 mai 2009
Histoire d’une liaison… sankaku-jime
extrait de l’Esprit du Judo, janvier 2009
En 1914, l’université impériale de Kyoto lance une compétition par équipes sur invitation pour les établissements techniques (« kosen« ) et universités, qui se déroule selon les règles classiques du moment… soit des équipes de quinze combattants, pas de matte, des combats d’une demi-heure ! Ces combats furent un accélérateur de la dynamique technique, au sol notamment. Tout commence avec Tsunetane Oda, petit gabarit très expert au sol, qui prend la direction du lycée de Sendai et cherche à s’imposer avec ses élèves débutants dans ce prestigieux championnat.
Il fait alors travailler ses combattants du matin au soir au sol, mettant en place des options tactiques défensives d’ordre « sportif » qui n’avaient pas encore été utilisées par des pratiquants encore très liés aux origines martiales de la pratique, comme la « position de la tortue« , la fameuse défense quadrupèdique fermée,toujours utilisée aujourd’hui. Il lui suffit alors de glaner un point avec son meilleur combattant et d’obtenir des matchs nuls successifs pour tous les autres avec ce type de procédé !
Mais quelques temps plus tard, à Okayama, une ceinture blanche invente la parade : ce sera sankaku-jime, avec un engagement de la jambe derrière l’aisselle qui ressemble au départ à un grand coup de talon pour « casser la carapace » de cette maudite tortue ! Mécontent de l’évolution trop sportive de ce tournoi où le résultat est survalorisé par rapport aux principes de la discipline, mécontent aussi de l’équilibre technico-tactique de ces combats qui ont lieu presque exclusivement au sol, Jigoro Kano fait changer les règles en 1926, empêchant la descente directe au sol et permettant à l’arbitre de faire relever les combattants. Ce style de combat perdurera cependant malgré lui jusqu’en 1942, et sera relancé en 1952 jusqu’à aujourd’hui.
Dans les années pré-sportives, l’amenée au sol efficace est popularisée par …un Brésilien. Le pionnier Helio Gracie, heritier de la technique d’un maitre du Kodokan du début du siècle, Mitsuyo Maeda, fait parler de lui à la télévision en défiant les experts d’autres disciplines, qu’il entraine au sol selon le procédé ancien éprouvé par les maitres du jujutsu. Il perd un combat médiatique en 1951 contre le poids lourd japonais Kimura, qui lui place ude-garami. Une technique connue aujourd’hui au Brezil sous le nom populaire de « kimura ».